Le Covid-19 n’a pas épargné Abdoulaye Elimane Dia dans sa vague de morts. L’homme d’affaires de 49 ans et maire apériste de Démette est parti à jamais. Il reposera à Oréfondé, aux côtés de son père, comme il l’avait souhaité.
Par Demba NIANG & Hamath KANE – A 9h, les statuts WhatsApp était un : «Rip Kaladio !», «Paix à son âme !», «Triste !», «Grosse perte !»… Les émotions sont exprimées par les émoticônes entre pleurs, surprise, douleur. Abdoulaye Elimane Dia, né en 1972, est décédé ce jeudi 5 août 2021 à l’hôpital Aristide Le Dantec, après quelques jours de combat avec l’irrésistible Covid-19 qui a fini par le terrasser. Il était déjà connu dans le milieu du Fouta, mais plus par ses amis d’enfance, des écoles et des universités. Baba Maal l’a élevé au rang de ses illustres Foutankés à travers ce morceau qui fait bouger même ceux qui ne comprennent rien de la langue pulaar. «Ahan Kaladio ! ablaayiiiii !» «Même les sérères dansent le Yéla», reprenait-on dans un des tubes du Dande Leñol. Avec le morceau dédié à Abdoulaye Elimane Dia, l’on a envie de dire : «Même les sérères dansent Kaladio !» Tellement ses envolées lyriques sont enivrantes. Envoûtantes. C’est l’un des derniers chefs-d’œuvre du chanteur. «Chaque fois que j’écoute le morceau, je suis profondément ému», confiait le défunt dans l’émission Aadi pulaar avec Souleymane Gollo, en 2018. Entre le maire de Démette et le roi du Yéla, c’est un long compagnonnage, une estime réciproque. La flamme de l’amitié s’est allumée alors que Kaladio était encore étudiant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar où il a même dirigé l’Association pour la promotion de la langue pular (Auplp), très active dans les activités culturelles. Le fils de Elimane ou Aboubacry Dia est le symbole d’un Foutanké accompli entre Podor et Matam. Puisque c’est à Dembancané, dans le Damnga, où servait son père, enseignant, qu’il obtient son Entrée en sixième. Puis, à Gourel Serigne, à Matam, le jeune Abdoulaye s’offre le Dfem en 1987 avant d’aller poursuivre ses études secondaires au lycée Mame Cheikh Mbaye de Tambacounda. Après l’année invalidée de 1994, Abdoulaye Dia s’inscrit à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Ucad pour décrocher la maîtrise en 1999. Il passe ensuite quelques années de sa jeunesse à Thilogne où «Dia», comme on appelait affectueusement le père, était affecté. Le voilà qui est enraciné dans la culture du Foutanké, dans ce village surnommé «Salndou Fouta (pilier du Fouta)». A l’annonce de son décès, beaucoup étaient assommés et attristés. Le surnom «Kaladio» porte tout le sens de la vie de l’homme. La commune dont il est le maire fait partie de cette contrée appelée «Halaybé» dont le singulier est «Kaladio». Mieux, le «Elimane» fait référence à son père Aboubacry. Mais lui a préféré le titre du chef de village de Démette, car c’est la famille Dia qui détient la chefferie.
Fortune capitale !
L’homme d’affaires n’a pas dévié de la trajectoire qu’il a déjà choisie en décrochant sa maîtrise en Droit des affaires en 1999. L’adage dit : «L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt.» De sous-traitant à la Sde à la création de 5 entreprises, le chemin a été long. Déjà en 1997, alors qu’il était en 2ème année à l’Ucad, il créé le Gie Bamtaare, spécialisé dans les Btp (assainissement, hydraulique, équipement etc.). Cette étoile brille. Il cherche et obtient son PhD en Gestion de portefeuille et Mba en Qualité. Un intellectuel reconnu par ses pairs. Et ce n’est pas pour rien qu’il a reçu les hommages du Centre d’études diplomatiques et stratégiques (Ceds), organisme doté du statut consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations unies, en tant qu’auditeur du programme doctoral PhD in Business diplomacy, promotion 2020/2021. L’enfant de Halaybé voit ses entreprises fleurir… de belles fleurs. Il n’est pas Crésus, par rapport aux grands noms connus, mais Kaladio était un homme discret et qui n’aimait pas trop parler de ses affaires. Il avait tout de même déjà fait fortune avant de créer le Groupe Fortunes capital S.a, «une société africaine d’investissement africaine, bâtie sur des valeurs et structurée par une forte culture d’entreprise», dont les projets s’organisent autour de : immobilier & Btp (60%), agrobusiness & distribution (25%), transport logistique (10%) et finances & médias (5%). C’est un manager qui emploie les mêmes principes dans toutes ses entreprises économiques, politiques et autres. «Nous nous devons de nous entourer des meilleurs afin de nous améliorer continuellement pour rester compétitifs dans cette mondialisation du business», écrivait-il dans «Le mot du Pdg» sur son blog. C’est le secret de son succès qui est visible à travers ses différents secteurs d’intervention. Tenez ! Le site de sa holding détaille ce que Fortunes capital a fait en 10 ans : «200 emplois directs, 1 500 emplois indirects, 10 supermarchés sur le territoire national, 4 000 logements sociaux économiques, 500 Logements et apparts standing, 500 ha de fermes aménagées.» Le tout, pour un total de plus de 60 milliards F Cfa investis. Ses différentes sociétés sont Atra S.a. qui intervient dans la conception, la construction et la réhabilitation, Hydrocons dans les travaux, les voieries, l’hydraulique, Fimolux, filiale de commercialisation de l’immobilier haut de gamme du Groupe immobilier Atex S.a. spécialisé dans le conseil, la promotion et la commercialisation, Elydia, dans la production agricole, la distribution, le transport & logistique, Ely-Agro, Elycargo, dans le transport routier, aérien et maritime, de la logistique et du transit… Ouf ! Mais aussi, Kaladio avait la vision d’un futur magnat des médias avec Capital média, un groupe de presse lancé par Fortunes capital, composé d’une radio (Sénégal Fm, La Radio de l’Economie) et d’un site d’informations en ligne en phase de conception. Malheureusement, il ne l’inaugurera pas.
«Faire de l’Île à Morphil la Californie de l’Afrique»
C’était le rêve de Abdoulaye Dia : «Faire de l’Île de Morphil la Californie de l’Afrique, un grand carrefour économique transfrontalier.» Pas qu’un rêve ! C’est l’esprit du visionnaire. Et sans doute, c’est une des motivations de son entrée en politique. Et un de ses amis, Abdourahim Pathé Ba, ajoute une confidence que Kaladio lui avait faite en mars 2008 : «Ba consultant, je veux que Démette soit un pôle économique le plus grand de Dande Mayo. Je veux que Démette soit comme Boghé et je suis prêt à financer les groupements de femmes et les associations de jeunes pour y parvenir.» C’était devenu son dada, le financement des femmes et des jeunes. «Abdoulaye Elimane Dia a financé de micro-crédits, organisé les jeunes dont il a assuré la formation. Il leur a alloué une enveloppe de 254 millions de francs, aménagé à leur profit 300 hectares et distribué gracieusement 20 millions aux Gie des autres villages de la grande île», précise Harouna Amadou Ly, dit Harouna Rassoul, dans un post. C’est pourquoi ces deux couches l’ont pleuré et continueront de pleurer leur mécène qui était comparé à Aliou Ardo Sow. L’homme était si social et sociable que son accès facile avait valu à son vaste bureau du quartier huppé des Almadies l’appellation de «Diakka Fouta». M. Ba d’ajouter dans son témoignage : «La maison de sa maman aux Parcelles Assainies grouillait de monde, qui venus pour se restaurer, qui venus pour solliciter une aide financière, qui venus pour un règlement d’une ordonnance…» Kaladio, c’était aussi le Cadre de concertation pour le développement de l’Île à Morphil (Ccdiam).
L’Adep du développement et de l’émergence de Podor
Cet esprit de partage et de générosité, il l’a appliqué dans la politique. Ce qui lui a valu d’être élu maire de Démette en 2014. Et, peut-être, un passeport pour les Locales de janvier 2022 qu’il ne verra, hélas, pas. Malgré ses affiches incitant les populations à aller s’inscrire sur les listes électorales. Son mouvement Alliance pour le développement et l’émergence de Podor (Adep) faisait de lui un… adepte de la bonne cause. Il a réussi à faire bouger les lignes et inquiéter les ténors de l’Apr en 3 ans. Il n’a pas toujours été en odeur de sainteté avec ses camarades du département. Un temps, dans la bataille entre Abdoulaye Daouda Diallo et Cheikh Oumar Anne pour le contrôle départemental, Kaladio était une sorte de troisième larron. Et cette adversité se lisait dans les accueils réservés au Président Macky Sall, parfois par une guerre des pancartes. Mais c’était aussi le cas de Moussa Sow ou encore Ibrahima Abou Nguette. C’est d’ailleurs parce que ce trio ne se sentait pas impliqué dans la gestion du parti présidentiel qu’il a lancé la «Coalition gagnante» qui, semble-t-il, entendait participer aux prochaines élections territoriales. Kaladio-Sow et Nguette invitaient d’ailleurs, à la veille de la dernière tournée économique de Macky Sall dans le nord, à «corriger les frustrations» et la «léthargie» de l’Apr. «Si rien n’est fait d’ici les Locales, on va vers un éparpillement de cet électorat. Ce qui sera préjudiciable à la coalition Benno bokk yaakaar», avertissaient-ils. Abdoulaye Elimane est parti. Mais le «Kaladio» de Baba Maal restera comme du marbre.(hamath@lequotidien.sn)
admin
octobre 24, 2018Some need to protect very valuable information. All these factors should be taken into account.
admin
octobre 24, 2018I ran Windows XP for a year to try to prove it. Less knowledgeable users can get their PCs infected no matter how much protection you give them. Software can’t protect people from themselves.